Motsahic

"Quand on vous reproche une faute de français, répondez que c'est un latinisme."

Archives du tag “club belge”

Que celui qui n’a jamais dicté me jette la première pierre!

Voilà trois semaines, j’ai donné, à Nivelles, pour le club du Cercle d’Or (club belge d’orthographe, auquel je vous conseille de vous affilier) la dernière dictée d’une série de sept consacrées aux sept péchés capitaux. J’avais, évidemment, gardé le meilleur pour la fin : la luxure! En voici le texte… Bon courage !

Il est des jours où Cupidon s’en fout

            La vérité est toujours plus amère qu’on ne l’eût cru. Disons-le sans ambages ni détour : j’en ai assez de faire l’Amour. Marre de jouer depuis quelque trois millénaires le Monsieur Bons offices pour des Horaces et des Curiaces, des Montaigus et des Capulets qui préfèrent s’entretuer* plutôt que s’entr’aimer… Ras-le-bol ! Je jette mes sagettes, pennes perdues désormais, et je rends mon carquois ! Car quoi, c’est bien beau, ces petits putti mafflus voletant deçà, delà ; mais tous ces rapins du quattrocento qu’on a prétendu être des génies se sont-ils jamais souciés de l’image qu’ils ont donnée de moi ? Un bambin potelé, affublé d’un minizizi et de génitoires atrophiés… Quand un nabi, plein de ses ukiyo-e, eût suffi à me rendre haut en couleur !  Au temps pour ma virilité ! Quant à ma mère, je la retiens, celle-là : v’là-ti-pas qu’elle s’exhibe sans soutif ni chiton, tout hébétée, quinaude et en conque errante, chez ce barbouilleur de Botticelli ! Trompette de la Renommée, vous êtes décidément bien mal embouchée !

Reprenons depuis le début. Je suis frère de Chaos et de Gaïa* (eh* oui, quasi personne ne le sait, ma sœur est Gê*), quoique en fait on laisse accroire qu’Aphrodite et son boutefeu d’époux sont mes soi-disant géniteurs. Quoi qu’il en soit et sans en faire une montagne, lorsque entre autres l’Épire est née, il y a beau temps que je me colletais avec des histoires plus chocs que chics, moins mélos que sadomasos ! De l’Olympe aux champs* Élysées et du Styx au Léthé, qu’on me croie ou non, le vit n’est pas un long fleuve tranquille ! Le peu d’exemples ci-après devraient vous en convaincre : Jason, qui ne désira plus Médée ; Apollon qui, libéré de ses envies de lyre, vécut de tragiques romans d’amour avec des nymphes mimi, telles Daphné ou Cyrène ; l’ithyphallique Priape ou les satyres chèvre-pieds, toujours prompts à jouer des membres actifs ! Des transes sexuelles, combien j’en ai connues : aucunes phalliques, aucunes féralies n’échappaient à ces bacchanales !

Par la suite, entre fine amor médiévale et royaume de Tendre précieux, ç’a bien roulé pour les passionnés de Voiture, avant que ce ne fût l’avènement des images : aux sténopés originels de Niépce succéda le siècle des Lumière et, de nos jours, si j’apparaissais en DivX ou dans des Blu-ray, il siérait sans doute qu’on m’ixât avec hardeurs et pom-pom girls peccamineuses ! Autres temps, autres mœurs : on a abandonné la mourre obsolète pour le strip-poker, les célibattantes férues de Kama-sutra* ont détrôné la fleur des korês* et la drag outrancière a remplacé l’Apoxyomène élancé d’un Lysippe… sans parler des chlamydiae ou des candida* qui vous ont collé des posthites !

Las ! Recru* des sens, seul dans mes cellae à jamais scellées, je ne parviens plus à bander mon arc et ma chère Psyché me renvoie l’image d’un vieux dieu éternellement jeune. La luxure est un luxe que je n’ai plus ; alors jouissez et, si m’en croyez, cueillez dès aujourd’hui l’Éros* de la vie…

 

* Variantes acceptées : s’entre-tuer – Gaia – hé – Gé – Champs – Kāma Sūtra – corês, corés – candidas – recru – éros

 

Test destiné à départager les ex æquo

1. Que préférez-vous ? Apelle ou Praxitèle, Donatello ou Canaletto, Van Rysselberghe ou Van Eyck, Carrache ou Caran d’Ache, Antoni Tàpies ou Salvador Dalí, Joan Miró ou Frida Kahlo, les macchiaioli ou les peintres dada, Soulages ou Zao Wou-ki, Andy Warhol ou Keith Haring, les préraphaélites ou les postimpressionnistes, les poyas valaisannes ou les pietà de Michel-Ange, les bodegóns ou les sgraffites ? En tout cas, je ne peux pas les voir en peinture !

 

Texte établi par Julien SOULIÉ

et chastement révisé par Michèle BALEMBOIS-BEAUCHEMIN

Navigation des articles